samedi 28 mars 2009

Du pain et des jeux



Avec le temps on digère tout et même plus. Après la campagne des CFF contre les autochtones de la Vallée du Rhône, une pilule de plus à avaler: la défaite de Gotéron chez les Grisons (dans le dico le grison est l'autre nom de l'âne, si si c'est vrai...) et une nouvelle fois à la 59e et des poussières, comme le match précédent. On leur souhaite malgré tout bonne chance aux Davosiens car défier les Aviateurs risque bien de s'apparenter à un atterrissage en piqué, donc sur le nez...

Du moment qu'on griffe la glace, un petit détour chez les pensionnaires de la ligue inférieure s'impose. Les Lions de Malley ont finalement gobé les Abeilles des Mélèzes. Incroyable mais vrai. Quel supporter et autre aficionado aurait osé parier sur un tel dénouement, sur une victoire finale des félidés, alors que les hyménoptères survolaient les débats depuis le début de la saison? Comme quoi dans la vie faut toujours y croire jusqu'au bout, se battre en permanence, jamais se résigner et encore moins abandonner. Levalesco en connaît un chapitre... et même plusieurs. Reste juste à espérer qu'ils iront au bout de leur rêve dans le round final face aux Seelandais

On le sait depuis belle lurette: le sport a toujours été et reste l'opium du peuple. Il l'hypnotise, l'anesthésie le temps d'un match, d'un tournoi, d'une compétition et le fait planer au-dessus de toute réalité. Le "retour sur terre" n'en est que plus brutal, à plus forte raison si la défaite l'accompagne.

Depuis quelques temps, les jours se suivent et s'assombrissent, donc se ressemblent. Des nuages de plus en plus noirs s'amoncèlent et nous annoncent un prochain déluge. Et les médias en profitent pour remettre sans cesse une (grosse) couche en nous arrosant d'articles pessimistes, en nous inondant de dépêches alarmantes, en nous submergeant de nouvelles apocalyptiques. Le commun des mortels complètement à côté de ses pompes ne sait plus à quoi se raccrocher. A part le sport, au titre de se répéter, plus d'antidote, plus de dérivatif et encore moins d'exutoire.

En fait, la recette pour lui remonter le moral, lui redonner confiance et le remettre sur les bons rails est simple: DU PAIN ET DES JEUX ! Le fameux PANEM ET CIRCENSES des Romains. Eh oui, il y a déjà plus de deux millénaires, le peuple demandait à Jules-César de la pitance et du cirque, pour oublier un quotidien qui n'était certainement pas meilleur que le nôtre. Se sustenter et s'amuser. Un besoin somme toute naturel et légitime. Entre deux bacchanales, une petite sortie pour aller se mettre sous la pupille quelques rétiaires, lions (pas ceux de Malley) et autres chrétiens cordialement "invités" aux festivités. A la différence qu'on ne pouvait pas tricher et leurrer le "consommateur". On levait le pouce ou on l'abaissait: "Ave Caesar morituri te salutant". Maintenant il frétille encore mais sur la télécommande: "Salut Couchepin ceux qui vont trinquer te remercient". Finalement on n'a pas évolué d'un... pouce. Pour preuve: des courses de chars au tiercé, des orgies au botellon, des esclaves aux clandestins, des ergastules à Guantanamo et, last but not least, des édiles d'alors aux débiles d'aujourd'hui, rien n'a changé; l'homme n'a jamais su se défaire de son inclination naturelle à la cupidité et au pouvoir. Il n'a pas voulu retenir les leçons de l'Histoire. Vingt siècles qui débouchent sur un nouveau déclin prévisible, voire inéluctable, à moins que...

A moins que le genre humain se hâte de retrouver les principes de base et les valeurs essentielles en effectuant un retour aux sources. D'aucuns vont maugréer et me qualifier de pessimiste et de défaitiste. Ils n'ont certainement pas tout tort, mais est-il encore nécessaire de montrer que, avant de passer au rouge, les clignotants étaient en stand-by à l'orange depuis une bonne décennie. Tous les responsables de cette énorme gabegie ont fermé les yeux et surtout leur gueule, que ce soit à l'échelon financier, économique, politique et, plus grave, climatique. Ils ont préféré jouer à l'autruche, donc se mettre la tête dans le sable. Grave erreur et surtout grosse conséquence: lorsqu'on se penche en avant pour ne rien voir de chaque côté et encore moins devant et en dessus, on a le baba qui est fortement exposé et qui finit immanquablement par prendre un sale coup.

OK, ce n'est pas encore le jugement final ou du moins il n'est toujours pas annoncé. Mais il faut avoir le courage de redresser la tête et de regarder les choses en face. A situation catastrophique, mesures exceptionnelles. En fait, suffiront-elles, permettront-elles de surmonter la crise ou bien ne seront-elles que les prémices d'une future débâcle générale ? Aucune civilisation antique, aussi raffinée et brillante fut-elle, n'a survécu. La nôtre, soit-disant moderne, n'échappera pas à cette finalité. Reste à savoir quand. Dans 50, 100, 500 ans ou plus? Qu'importe. Le terme, déjà fixé, n'est heureusement pas connu. Donc rien ne sert de baisser les bras et de se laisser aller. Bien au contraire. Les générations précédentes nous ont concocté un menu de choix et nous l'ont offert sur un plateau. A nous d'assurer le même couvert aux suivants et, si possible, avec tous les ingrédients appropriés.

Le pain est une chose, les jeux une autre. Se divertir c'est bien, bouffer c'est mieux. Quand l'estomac est repu la perception du monde est totalement différente. Les crève-la-faim de toujours ne viendront pas me contredire. Goulags, Auschwitz, Biafra, Darfour, pour ne citer que les plus "classiques", n'infléchiront pas la destinée humaine. En somme, une régulation naturelle et inévitable de la population terrestre? La question est posée et reste ouverte. Autrefois, la peste donnait quelques coups de main et surtout beaucoup de boulot aux croque-morts. Aujourd'hui le syndrome de l'immuno-déficience acquise est notamment en train de prendre le relais. Signe des temps ? Nécessité démographique ? Finalité banale? Toute prévision serait hasardeuse et imprudente.

Et pourtant la réalité nous saute à la truffe. Des nations entières vont boire le calice jusqu'à la lie. On peut s'apitoyer sur leur sort, mais à quoi bon en fin de compte. Bientôt sept milliards d'âmes crapahutant sur une planète de plus en plus invivable, saturée de détritus, au bord de l'asphyxie. Les épidémies et guerres d'antan ont contribué à un toilettage de circonstance. Un scénario identique serait-il suffisant à l'heure actuelle ? Permettrait-il de remettre les pendules à l'heure ? On peut en douter, même très fortement. Une chose reste néanmoins sûre: du pain et des jeux c'est du passé, c'est définitivement aux oubliettes. Pour les jeux du moins, quant au pain... Mais demain est un autre jour...

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